Le kiteur rat c'est celui qui ramène toute conversation à l'argent, à la valeur vénale des choses. Réglé comme une horloge, le mot euro revient dans sa bouche toutes les deux minutes avec une précision métronomique.
Le kiteur rat c'est celui qui exulte quand il apprend qu'il a payé moins cher que toi. Il jouit quand c'est le cas pour du matos de kite.
Le kiteur rat c'est celui qui ne respecte qu'aussi rat que lui, voire qui dispose de beaucoup d'argent. Éventuellement, il a de la considération sportive pour qui passe mieux certains tricks que lui. Mais en revanche, il n'a que condescendance pour celui qui voit en l'argent un moyen et non une fin. Je pense à une réplique culte de "La vérité si je mens" : « Son mari y peut pas reprendre l'affaire, il est médecin le pauvre ! » : sous-entendu, le gars n'est pas un homme d'affaire, il ne sait pas gagner de l'argent, c'est le raté de la famille. Il n'est QUE médecin... tu vois l'esprit ?
Le kiteur rat c'est celui qui consacre du temps à rechercher les meilleurs plans, pas très loin du spot, pour s'empiffrer à vil prix, même en France. Il sait aussi les petites astuces des aires de péage de l'A7 où, en entrant par la porte de derrière, on peut accéder à une salle de déjeuner et profiter du café, gratos.
Le kiteur rat c'est celui qui, obligé de prendre sa voiture (parce que c'est son tour) déplore que dans le calcul de la quote-part de chacun pour partager les frais, ne soit pas comptée l'obsolescence de son véhicule car... « il s'use ».
Le kiteur rat c'est celui qui, lors d'un trip kite de 3 jours, décide de dormir sur le parking du B&B, dans la bagnole avec sa femme, plutôt que de louer une chambre. En revanche, aucune gêne pour quémander l'accès à ta douche, en catimini de la direction de l'hôtel, bien entendu.
Le kiteur rat c'est celui qui, à l'autre bout du monde, va trouver par terre un billet de 50 euros sans que jamais ne lui vienne à l'esprit de partager sa bonne fortune en offrant un verre à ses compagnons de route.
Le kiteur rat c'est celui qui profite que sa femme soit prof pour aller dans des campings de profs (GCU/ MAIF, peu chers) où la cogestion est la règle (chacun doit apporter sa petite contribution au fonctionnement, comme le nettoyage des sanitaires... dans la mesure où la durée du séjour dépasse deux jours)... et se tire au bout de 48 heures pour échapper à la corvée.
Le kiteur rat c'est celui qui ramasse une barre ou un harnais oublié sur un de ses spots coutumiers et... le range dans son quiver ou le revend.
Le kiteur rat c'est celui qui descend kiter avec un pote et, chemin faisant, ne voyant pas les arbres bouger au bord de l'autoroute, décrète qu'il faut faire demi-tour. Mais devant la stupéfaction du conducteur et son intention de poursuivre car il préfère tenter le coup, partis pour partis... se met à menacer :
- « Je te préviens, s'il n'y a pas de vent, je ne paie pas ma part ! ».
Le kiteur rat c'est celui qui, en vacance trip kite dans un pays où le niveau de vie moyen est 20 fois inférieur à celui de la France, ne va pas hésiter à taper un scandale s'il y a, à ses yeux de rapace, une erreur de 50 cents en sa défaveur sur une note de restau.
« Parce qu'y a pas de raison, parce que POUR EUX 50 cents c'est beaucoup, et que donc ils m'arnaquent d'autant ! ».
Le kiteur rat c'est celui qui, dans le même genre de pays que le précédent, va vider le savon liquide et le shampoing fournis gracieusement par l'hôtel dans ses propres flacons vides et demander le lendemain, sans ciller, à une femme de ménage qui gagne quelques euros par jour... de réapprovisionner la salle de bain. Pas une seconde il ne va se sentir gêné par le regard oblique de l'employée qui a compris le manège (pauvre n'étant pas le synonyme de conne).
Le kiteur rat c'est celui qui, toujours dans un pays ravagé par la pauvreté va se mettre en colère parce que tu laisses quelques euros de pourboire, car se faisant :
- « tu fausses ainsi l'économie locale » et que par conséquent, les autochtones vont vite comprendre qu'ils peuvent augmenter leurs prix... et accessoirement, notre kiteur rat ne pourra plus se vanter une fois rentré au pays, face extatique et sourire ouvert d'une oreille à l'autre :
- « Je te promets : du vent tous les jours ET EN PLUS tu bouffes comme un chancre pour moins de 5 euros !!! ».
Le kiteur rat c'est celui qui est dans le déni permanent. Il ne se voit ni rat ni même pingre : il est économe, voilà tout. On lui a appris à ne pas jeter l'argent par les fenêtres alors il reste prisonnier de son éducation. Ce n'est pas sa faute. Au contraire, il se trouve plutôt malin et vit chacune de ses trouvailles pour dépenser moins comme un petit bonheur supplémentaire. Et puis il n'est pas riche. Pensez, un fonctionnaire quinquagénaire, c'est misère et compagnie. C'est Germinal et Les Misérables mariés ensemble !
Le kiteur rat c'est celui qui souffre plus à l'idée d'être séparé de son bel argent qu'à la perspective de son trépas. Peut-être rêve-t-il, comme Pharaon, d'une chambre mortuaire où seraient entassés avec sa dépouille, son précieux matos, le sonnant et le trébuchant de son assurance vie et la liste exhaustive de toutes les économies qu'il a réalisé au cours de sa vie, peinte sur les murs, genre fresque ?
Lecteur, tu te demandes si ce qui précède est le fait d'un seul ou de plusieurs : d'un seul. Tu dois donc te dire que j'ai un tantinet exagéré les choses pour rendre ce texte plus accrocheur : non, (à part deux anecdotes rapportées) c'est du vécu. Et donc logiquement, tu dois alors t'étonner qu'on puisse supporter des gens comme ça : au début, c'est tellement gros que ça fait plutôt sourire. Puis on se lasse ; puis on se fâche ; puis il devient impossible de voir ce genre d'individu, même en peinture, sans avoir un haut-le-cœur. Hélas, les kiteurs rats et les autres partagent les mêmes spots...
Et toi, lecteur, des radasses de concours, tu en connais dans le milieu du kite ?
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