Range tes lignes, Amiral de bateau-lavoir* !

En 2022 les terriens découvriront une nouvelle étoile sur la nappe noire du ciel répondant au joli nom de KIC 9832227. Elle sera le résultat de la fusion de deux corps célestes et formera une nova rouge extrêmement lumineuse. 2022 c'est dans 4 ans et pourtant, la prédiction que vous venez de lire n'en est pas une. Elle est déjà une réalité concrète datant de… 1800 ans. Si les insignifiants microbes que nous sommes n'apercevront la géante rouge que dans 4 ans, c'est que justement, celle-ci est située à 1804 années lumières de la Terre. En d'autres termes, il faut à la lumière générée par cette vieille-nouvelle étoile pas moins de 1804 années pour parvenir jusqu'à nos rétines ébaubies. Tout ça pour dire : l'espace c'est grand !

C'est tellement grand que cette immensité indicible échappe à la raison du commun des mortels. En général, quand on essaie de se représenter ce type de distance, l'esprit finit par disjoncter. C'est pourquoi le monde des homo sapiens sapiens se divise en deux catégories.

Les humains de la première catégorie renoncent plus ou moins vaguement à l'idée même d'univers parce que tellement vaste qu'il en paraît infini, donc anxiogène. Ils se réfugient dans l'idée confortable d'un monde fini (la Terre) avec, en périphérie, un ciel habité d'anges, de dieux, de diables et tout plein d'autres niaiseries un peu à l'image des hommes (à quelques ailes cotonneuses ou queues fourchues près). Le drôle de l'histoire c'est qu'ils espèrent en tirer un bénéfice d'éternité. D'un côté, ils ne peuvent admettre l'infini de l'espace mais, de l'autre, en appellent à celle du temps. Disons qu'ils font un peu leur petite tambouille spirituelle comme ça les arrange. Grand bien leur fasse !... tant qu'ils ne brisent pas les grelots de l'autre catégorie à grands coups de crucifix… ou de kalachnikov.

Pour la seconde catégorie, c'est tout l'inverse : non seulement ces immensités intersidérales ne les dérangent pas plus que ça mais, ils ont tendance à les imaginer un peu partout, y compris là où on ne risque pas de les trouver comme… un spot de kite. Le kite c'est « tellement trop l'esprit de liberté » que certains associent ce mot si cher avec un autre qui n'a rien à voir : la désinvolture.
Et que j'arrive nonchalant avec tout mon bardas, et que je te balance tout ça par terre du geste auguste du conquérant – genre je pose mon sac comme je plante mon drapeau sur une terre vierge et inconnue – et que surtout, je laisse tout mon merdier, sac, board, barre, chaussons, casse-croute, pompe… tout bien étalé tout partout. Plus tard, je décollerai en laissant bien traîner toutes mes cagades à l'endroit exact où je les ai balancées. Puis, quand je rentrerai boire un coup, je poserai mes lignes telles quelles, sur toute leur longueur, et me tirerai au cul de ma bagnole le temps de ma pause. Pourquoi se gêner ? y a tellement de place partout ! Et bien sûr, quand je voudrai repartir à l'eau, je ne manquerai pas de râler contre tous ces cons qui ont posé leur aile sur mes lignes ! L'enfer c'est les autres, disait Sartre (le philosophe, pas le département).

Alors ami, frère, autre moi-même, à moins que tu ne sois posé sur une de ces plages brésilienne longues comme toute la Côte d'Azur, s'il te plaît, RANGE TES LIGNES (et tout ton merdier) zouave interplanétaire* !

Spéciale dédicace à ceux qui se reconnaitront dans cette 2^e catégorie et qui rident sur le spot du Pont-Levis à Sète, où l'on grée sur un banc de sable à taille variable, souvent plus petit qu'un court de tennis… et parfois même, pas plus grand qu'un court de squash.

*Injures du Capitaine Haddock